Impacts négatifs des projets de développement en Guinée : des acteurs plaident pour l’adoption d’un référentiel national sur la réinstallation, la compensation et l’indemnisation des communautés impactées
Depuis belle lurette, certaines zones de la Guinée sont exploitées par diverses sociétés. Minières pour la plupart, ces sociétés font régulièrement face à la colère « saine » des communautés de leurs zones d’exploitation. En cause, ces communautés se plaignent des impacts négatifs des travaux de ces sociétés sur leurs cultures notamment.
Pour changer la donne, le Ministère des Mines et de la Géologie, avec le pilotage de celui de l’environnement, sous la vigilance du Collectif des OSC pour la défense des droits des communautés impactées par les projets de développement en Guinée (CODEC) et d’autres acteurs, a initié le référentiel national sur la réinstallation, la compensation et l’indemnisation des communautés impactées par les projets de développement en Guinée.
Ce mercredi, 7 mai 2025, s’est tenu dans un réceptif hôtelier de Conakry, un atelier de plaidoyer pour l’adoption dudit référentiel. L’événement a réuni plusieurs acteurs venus de plusieurs horizons. Amadou Bah, coordinateur du CODEC a longuement décrit l’impact des travaux d’exploitation de ces sociétés sur les communautés :
« Pourquoi on parle du référentiel aujourd’hui ? Parce que nous avons constaté, en quelque chose, des défaillances, des insuffisances. Et nous, en tant que CODEC, nous avons fait le tour du pays de 2018 à 2020, pour recenser les problèmes liés aux questions de compensation. Nous sommes allés à Guécké pour voir l’histoire de la SOGUIPAH, comment les populations de cette localité ont connu cette expérience de compensation et d’expropriation des terres. Nous sommes allés à Forécariah pour voir l’expérience de la société Forécariah Guinée Mining à l’époque à Lansanaya, notamment dans Laya. On est allés à Kaléta voir également l’expérience des populations de cette localité qui ont été déplacées. Mais bien avant Kaléta, il y a eu Garafiri où des milliers de personnes avaient été également déplacées (…). Et le gouvernement et les communautés sont à la merci des investisseurs qui utilisent des cabinets qui leur proposent parfois des solutions moins coûteuses et qui, parfois, ont des conséquences assez importantes sur les moyens de subsistance des communautés qui perdent leurs terres. Et chez nous, la valeur d’une personne se résume souvent à ses biens, à ses terres. Quand on perd ses terres, on perd sa valeur, on perd ses moyens de subsistance, on perd sa dignité. Et pour éviter que cette situation ne perdure, et qu’à cause d’un manque d’attention de l’État, que les populations continuent à faire face à une telle situation, ça ne profite pas aux investissements. Le service des relations communautaires et du développement du contenu local le sait. Si nous parlons du secteur minier qui est le secteur le plus important pour le moment en Guinée et qui déplace plus de personnes, il gère plus de problèmes qu’il n’apporte parfois d’opportunités à ces communautés. Il y a souvent des remous liés aux revendications par rapport au processus de compensation qui ne soit pas juste, équitable et qui ne prend pas en compte l’ensemble des biens », a-t-il fait savoir.
Parlant des impacts négatifs, M’mayoula Camara en a été victime à plusieurs reprises dans son district de Tambaya, relevant de la sous-préfecture de Wankinfond, préfecture de Coyah. En langue du tiroir, elle a envoyé un message fort à l’endroit des autorités :
« Quand les investisseurs commencent à travailler, des habitants vont fuir leurs maisons durant des heures. Les eaux issues des mines envahissent nos cultures maraîchères, impossible donc d’arroser nos champs. Le gouvernement doit prendre ses responsabilités. Quand les sociétés souhaitent acquérir des terres, les communautés n’en bénéficient pas, contrairement aux responsables de district qui signent leurs documents d’exploitation dans la zone. Nous ne connaissons que la culture de nos terres. Par exemple s’il s’agit de la culture du riz, de mai à août, si les sociétés exploitent dans la zone, les eaux issues des mines peuvent détruire nos productions. Même les exploitants des carrières font également partie de cette destruction. Le gouvernement doit se lever pour y mettre fin, au cas contraire, il doit penser à mettre en place des mesures idoines de compensation », a-t-elle plaidé.
D’ores et déjà, les autorités disent ne pas manquer de volonté pour pouvoir changer la donne. C’est du moins l’assurance donnée par le représentant du ministère de l’Environnement à cet atelier :
« Nous sommes en train de travailler d’arrache-pied afin que ce document puisse être finalisé (…). On est en train de développer ce projet pour qu’il puisse devenir un guide national qui puisse fédérer tous les projets de développement, pas que les projets miniers. Des projets d’ordre relatif aux infrastructures routières et tout ce qu’on peut connaître comme projet du développement. L’engagement ne peut venir que du président de la République parce que le document doit être accompagné par un projet de décret qui est soumis en Conseil des ministres et qui va aussi suivre la voie normale pour qu’il puisse être accompagné et le rendre plus contraignant, parce que nous avons compris que le document qui est là, il y a une grille différentielle entre les différentes institutions ou les différentes sociétés minières. Nous voulons régulariser cette situation pour que toutes les sociétés dans les régions administratives puissent donner les mêmes montants et les mêmes compensations. En voyant le référentiel à son annexe M qui traite les questions relatives aux infrastructures, vous voyez par région quel montant accordé au type d’infrastructure (…). Donc, il est important que nous puissions faire accompagner document d’un acte qui est le projet de décret pour qu’il puisse être contraignant et obligatoire pour toutes les sociétés minières », a déclaré M. Touré.
Mohamed Lamine Souaré pour Siaminfos.com
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