Lutte contre le détournement des deniers publics: le regard de Me Mohamed Traoré sur le rôle de la CRIEF et la population
Arrivé au pouvoir le 5 septembre 2021, le Comité National de Rassemblement pour le Développement (CNRD) a mis en place la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF). Depuis lors, plusieurs anciens dignitaires sont poursuivis par cette juridiction spéciale. Il y a quelques jours, Amadou Damaro Camara et Dr Mohamed Diané, respectivement anciens président de l’Assemblée nationale et ministre de la Défense Nationale, ont été condamnés.
Me Mohamed Traoré, ancien bâtonnier de l’ordre des avocats fait remarquer que « pour faciliter et pérenniser le travail important de la CRIEF, il serait utile de créer un organe spécial dont la mission serait de mener des enquêtes plus poussées et plus complètes sur les présumés cas de d’enrichissement illicite. Ne soyons pas dupes. Même avec la création de la CRIEF et des décisions comme celles qui viennent d’être rendues contre Dr Mohamed Diané et M. Amadou Damaro Camara, pour ne citer que ces deux exemples, le fléau de l’enrichissement illicite est loin d’avoir disparu et ne dispaitra pas de sitôt. Disparaîtra-t-il un jour ? On doit l’espérer et même le souhaiter. Il n’est pas exclu qu’au moment même où la CRIEF rend des décisions sévères contre certains pour des délits économiques et financiers, d’autres, se croyant plus malins et plus bénis, commettent sans aucune crainte, les mêmes types d’infractions. Ils iront peut-être jusqu’à penser que cala n’arrive qu’aux autres en oubliant que l’impunité n’est jamais garantie ad vitæ eternam à personne », dit-il avant de poursuivre :
« Pourquoi beaucoup cherchent à obtenir des postes de responsabilité dans l’Administration publique et à s’y accrocher au prix de la démagogie, de la propagande, de la flagornerie et de toutes les formes de bassesse ?
La réponse est très simple. Dans nos pays, l’un des moyens les plus rapides et les plus faciles pour s’enrichir est d’exercer certaines fonctions ou de travailler dans certains secteurs d’activité ( Impôts, Douanes, Justice etc. )
Ce n’est pas pour servir forcément le pays. Ils ne servent même pas le président de la République au nom duquel ils prétendent s’exprimer et agir souvent. Chacun se dit, » c’est mon tour ; je vais en profiter ». L’existence de la CRIEF n’est pas une fin en soi et les décisions qu’elle rend ne doivent pas laisser penser qu’elle a atteint ses objectifs. C’est un travail de longue haleine. Et il serait important d’avoir un regard constant sur la CRIEF elle-même pour savoir si elle continue d’être au-dessus de tout soupçon et est toujours apte à accomplir avec efficacité la mission qui est la sienne. Les corrupteurs sont en effet très forts et ont pour devise » tout le monde a un prix ». Parfois, on les entend même dire qu’il faut tout simplement de découvrir le degré de corruptibilité de chacun pour mettre les moyens qu’il faut. Ils n’ont pas toujours tort. Ainsi, même la CRIEF n’est pas à l’abri du fléau. C’est pourquoi, les magistrats de la CRIEF doivent être mis dans des conditions qui leur permettent de résister à toutes les formes de tentations. Et Dieu sait que ce n’est pas ce qui manque. Les mauvaises pratiques ont la peau dure. Des porteurs de valise, des « démarcheurs » ou » intermédiaires » judiciaires, ça existe aussi », révèle-t-il avant de conclure:
« Et puisque des décisions commencent à tomber, certains s’emploieront à développer plus encore les techniques d’enrichissement illicite, à perfectionner l’ingénierie du vol et des détournements de deniers publics, dans le but d’échapper aux organes de lutte, de poursuites et de jugement. Une adaptation sans cesse continue de ces organes est donc nécessaire. Sans faire de la délation, les citoyens devraient jouer un rôle important dans ce combat au lieu d’être parfois des profiteurs directs ou indirects, voire des complices des actes de corruption et autres. »
Mohamed Lamine Souaré pour Siaminfos.com
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