Polémique autour du coût de rénovation de la résidence du PM : Dr Alhassane Makanera révèle des dysfonctionnements et apporte des éclaircissements
Dans un courrier adressé au ministre de l’Économie et des Finances, le Premier ministre guinéen a sollicité plus de 6 milliards de francs guinéens pour rénover, aménager et équiper la résidence du chef du gouvernement. Un courrier qui n’est pas du goût de bon nombre de Guinéens qui ont dénoncé un coût « exorbitant ». Alors que plusieurs questions restent pour l’heure sans réponses, l’économiste Makanera Kaké a tenu à mettre le point sur le ‘’i’’.
D’entrée, l’universitaire laisse entendre que dans ce cas de figure, on ne peut pas parler de marché : « D’abord, il y a des non-dits dans le marché lorsqu’on nous dit que le marché est déjà exécuté à 50%, et que c’est après l’exécution à 50% on demande une autorisation de conclure le contrat. La question juridique qu’on se pose, mais comment le marché a été réalisé ? Or, il n’y a pas de marché s’il n’y a pas de contrat. De l’autre côté, le marché public est un contrat écrit, sa nature est claire. C’est un contrat écrit entre deux personnes au moins dont une est forcément une personne publique. Donc, l’exécution de 50% n’est pas un marché public parce que c’est maintenant on demande le contrat. Le second problème juridique, pour les marchés de gré à gré, il y a un certain nombre de conditions qui sont au nombre de 7. On peut citer les principales conditions : l’autorisation préalable. Dans cette autorisation, l’autorité contractante est obligée de justifier pourquoi elle a opté pour le gré à gré alors que le principe c’est l’appel d’offre ouvert, l’appel d’offre restreint ou l’appel d’offre avec concours. Pourquoi elle renonce à ces trois formes normales qui sont les règles ? », s’interroge-t-il avant de poursuivre :
« Troisièmement, le marché qu’il doit passer, l’ensemble des marchés cumulés écrits dans le plan de passation ne doivent pas dépasser 10% du total de marché qui doit passer. Et si cela n’est pas fait, la personne responsable doit aviser. Ce qui est vraiment important, c’est que l’entreprise adjucatrice doit se soumettre au contrôle régulier des prix, elle doit publier son compte de résultats, ses comptes pertes et profits, également le bilan. Et tout document qui permettra à ce que son prix soit connu, éviter ce qu’on appelle exactement la surfacturation. Mais ce qui est très important, l’article 37 de notre code de passation de marchés est clair: tout marché passé par entente directe et qui ne bénéficie pas d’une autorisation préalable, est nul et nul de tout effet ». Ce qui veut dire que les 50% exécutés, en appliquant l’article 37, c’est nul et de nul effet. C’est un autre marché qu’on doit engager, ce n’est plus celui-ci. Donc, il faut relancer toute la procédure, le premier doit entrer dans le cas de ce qu’on appelle en droit administratif l’inexistence. C’est comme le vis est tellement grand qu’on ne peut pas l’accepter dans l’ordonnancement juridique. Donc pour moi, c’est un autre marché que le Premier ministre demande qui n’est plus le marché exécuté à 50%. Tout doit être repris à zéro, il faut retrouver un nouveau adjucateur, même si c’est par entente directe mais l’entente directe ne veut pas dire aussi qu’on écarte les trois entreprises, non. Au moins, vous devez avoir trois entreprises. Le peuple a besoin à ce que le contrat soit publié et que le bilan de l’entreprise soit publié, et que ses comptes pertes et profits soient publiés pour qu’on ait une idée de son prix pour pouvoir calculer son bénéfice. Si le contrat est publié, ça renforce l’idée de moralisation de la part du CNRD », a-t-il martelé.
Mohamed Lamine Souaré pour Siaminfos.com