La Guinée est un pays où la majorité de la population est jeune, voire même très jeune. Des jeunes dont la plupart fléchissent sous le poids de la galère, à cause du manque d’emploi. Une situation au goût âpre, qui a conduit le gouvernement guinéen à mettre en place le Fonds d’Insertion dans le processus de développement socioéconomique du pays. Même si beaucoup ignorent encore les efforts consentis par cette structure pour accompagner la jeunesse guinéenne, tout semble indiquer aujourd’hui que le FONIJ est en train de se frayer un chemin. Mais, comment ce Fonds National d’Insertion des Jeunes est organisé? Quelle est sa mission et qu’elles sont ses attributions ?? Des questions entre autres, que nous avons posées au directeur du FONIJ vendredi, 14 avril 2023.
Dans cet entretien exclusif, Abdourahamane Baldé a parlé de la structure qu’il dirige avant de révéler ses perspectives.
Siaminfos.com: Parlez-nous de la mission du Fonds National pour l’Insertion des Jeunes?
Abdourahmane Baldé : le FONIJ est un établissement public à caractère administratif qui s’occupe de l’insertion socioprofessionnelle et économique des jeunes qu’il a la responsabilité de faciliter l’insertion à travers l’accompagnement technique et financier des jeunes âgés de 15 à 35 ans, sur l’ensemble du territoire national. Ça concerne à la fois des jeunes diplômés mais également et non scolarisés. L’objectif du FONIJ, c’est essentiellement sur l’accompagnement des jeunes à travers le financement des micros projets où des projets pour lutter contre la pauvreté mais également faire des jeunes des acteurs socioéconomiques majeurs pour l’émergence d’une économie assez solide parce que, vous le savez à travers le monde, ce sont les jeunes qui bâtissent des entreprises. En Guinée, le travail est un droit et les jeunes méritent d’être occupés. C’est pourquoi l’Etat a pensé qu’il faut s’occuper des jeunes à travers le Ministère de la Jeunesse et des Sports qui est notre tutelle technique mais également le Ministère de l’Économie et des Finances qui est notre tutelle financière. Il y a une partie du financement qui vient du budget national et l’autre partie doit venir des partenaires techniques et financiers et même de nos différentes contributions en tant que citoyens à travers des activités de levée de fonds en Guinée et à l’étranger. Nos objectifs, c’est d’occuper le maximum de jeunes, d’accompagner le maximum de projets.
Quelle est la stratégie utilisée par le FONIJ pour appuyer les entrepreneurs ?
La stratégie, c’est le rapprochement. Nous voulons être l’EPA le plus proche des jeunes, c’est pourquoi vous nous voyez à N’Zérékoré, Lola, Macenta, Gueckédou, Labé, Tougué, Mamou, Pita, Dalaba, Kankan, Faranah, Kindia, Conakry, sur les Îles, ainsi de suite. Nous voulons être plus proches des jeunes pour pouvoir être à leur écoute, identifier leur besoin et voir dans quelle mesure les accompagner, c’est la première des choses. La deuxième des choses, c’est de faciliter pour les jeunes l’accès au financement. Nous sommes venus trouver un peu de difficultés liées aux conventions qu’il fallait signaler. Nous avons simplifié les documents et la procédure, et nous avons trouvé que la plupart des accompagnements qui ont été faits depuis la création du FONIJ jusque-là étaient concentrés dans des zones qui ont reçu beaucoup de financements pendant que d’autres zones étaient un peu oubliées. C’est pourquoi, nous avons décidé de privilégier l’intérieur du pays et revenir sur conakry et sur les Îles. La troisième stratégie, c’est de transformer les jeunes en des acteurs eux-mêmes. Nous avons développé une salle numérique équipée de 25 ordinateurs, nous avons constitué quatre groupes pédagogiques qui sont formés pendant un mois au FONIJ. Chaque mois, nous prenons 100 ou 125 jeunes, nous renforçons leurs capacités en informatique pour qu’ils soient autonomes et qu’ils soient aptes à développer leurs business plan, à communiquer, à faire le marketing de leur business et qu’ils soient aptes à aller démarcher des partenaires eux-mêmes pour qu’ils puissent avoir accès au financement. Ensuite, c’est le management inclusif, à l’interne chaque travailleur du FONIJ sait qu’il a la responsabilité d’aider à la matérialisation, à l’atteinte des objectifs qui sont consignés dans la lettre de mission. Nous avons signé une lettre de mission avec le ministre de la Jeunesse et des Sports, nous avons signé un contrat de performance que nous sommes en train de matérialiser à travers l’exécution des activités qui sont contenues dans le PTA. En 2022, le FONIJ a atteint 100 % de ses objectifs. Au premier trimestre 2023 également, nous avons fini de déposer tous les rapports d’activités au bureau de stratégies et de développement à travers notre service suivi et évaluation, le service opération et programme et tous les autres programmes qui travaillent d’arrache-pied pour que les objectifs soient atteints. Notre stratégie, c’est de faire en sorte que nos objectifs soient atteints à 100 % en 2023, également.
À date, vous avez accompagné combien de jeunes ?
Nous avons formé 50 jeunes à N’Zérékoré, 50 à Kankan, 50 à Labé et 50 jeunes à Mamou. Ce qui fait 200 jeunes techniquement accompagnés à l’intérieur du pays. Ici au FONIJ, au mois de mars, nous avons formé 100 jeunes et chacun avait son ordinateur. Nous avons accepté autour de 24 microprojets à Mamou, nous avons accompagné autour de 21 projets à Faranah. En partenariat avec l’APIP, nous avons décidé d’accompagner les jeunes de Faranah, Labé, N’Zérékoré, un peu partout pour qu’ils puissent formaliser leurs entreprises, c’est un processus qui est déjà mis en place. A Tougué, nous avons accompagné autour de 50 projets, à Labé, c’est la même chose. Nous avons accompagné des jeunes à Lelouma, Mali autour de 12 projets et nous sommes en perspective d’aller à N’Zérékoré pour accompagner le maximum de projets. Nous voulions accompagner 45 projets, ça sera un peu plus que ça parce que nous nous sommes aperçus que les jeunes de N’Zérékoré pour la plupart sont très actifs mais ils manquaient de soutien. Pour le moment, on a priorisé l’accompagnement en nature.
Vous venez de parler des accompagnements financiers, dites-nous comment ça se passe? Est-ce qu’il y a certains qui ne remboursent pas?
En ce qui concerne l’accompagnement financier ou en nature, nous avons fait un diagnostic à l’interne pour voir quelle est la situation réelle du FONIJ. Nous nous sommes retrouvés avec un niveau de remboursement très faible, la plupart de ceux qui ont reçu les financements en 2016, n’ont pas remboursé. Ceux qui ont reçu en 2019 ont du mal à rembourser. A date, on a pas 60 millions remboursés sur toute l’enveloppe qui a été donnée et ça aussi, c’est grâce à nos actions qui continuent d’ailleurs parce qu’on a un service suivi et évaluation, et même aujourd’hui, on était sur ce coup-là pour décider que tous ceux qui étaient censés rembourser les financements qui ont été attribués avant notre arrivée, qui avaient des conventions avec le FONIJ qui n’ont pas remboursé mais qui devraient pourtant rembourser depuis 2019, désormais nous allons faire appel à la justice parce que l’argent de l’Etat est sacré. Ceux qui ont reçu l’accompagnement doivent rembourser pour que d’autres jeunes aussi aient accès à l’accompagnement. Très prochainement, ces actions seront engagées.
On peut avoir une idée sur le budget annuel alloué au FONIJ pour l’accompagnement des jeunes entrepreneurs ?
Le budget de 2022 tournait autour de 3 milliards de francs guinéens, quand on est arrivés, nous nous sommes efforcés à faire appel de 5 milliards sur l’enveloppe de 2021, qui était là. Grâce à l’accompagnement de l’Etat, nous avons pu bénéficier d’une enveloppe de 5 milliards de francs guinéens. C’est ce que nous avons utilisé de juillet 2022 à maintenant, à la fois pour la rémunération des travailleurs à l’interne, pour le carburant, pour tout ce que vous nous voyez faire. En 2023, l’enveloppe qui a été présentée au CNT tournait autour de 3 milliards. Après, le CNT au regard des actions que nous menons sur le terrain, a demandé à travers un amendement à ce que le budget du FONIJ soit rehaussé avec une enveloppe supplémentaire de 1 milliard. Ce qui nous a envoyés à 5 milliards 15O millions de budget pour 2023. Nous n’avons pas encore commencé à encaisser jusque-là mais le mécanisme continue.
Interview réalisée par Ibrahima CAMARA pour siaminfos.com