Manifestations meurtrières à Conakry : une délégation des Forces Vives de Guinée rend visite aux familles endeuillées
Lors des manifestations appelées par les Forces Vives de Guinée (FVG), des Guinéens ont été arrachés à l’affectation de leurs familles. Ils sont au total six (6) jeunes, selon le bilan fourni par le collectif, qui ont perdu la vie au mois de mai dernier. Pour consoler les parents des victimes, une délégation des Forces Vives de Guinée (FVG) s’est rendue ce dimanche, 10 septembre 2023, dans les familles endeuillées des cinq (5) autres jeunes tués. Après les salutations d’usage, les émissaires ont remis une enveloppe symbolique à chacune des cinq (5) familles.
La délégation s’est rendue d’abord dans la famille du défunt Ibrahima Sory Diallo, à Hafia. Sa mère Fatoumata Diallo inconsolable, est revenue sur les circonstances de la mort de son enfant avant de remercier le collectif pour ce geste magnanime :
« Je suis vendeuse du riz à la Minière. Le mercredi matin, nous sommes partis ensemble là-bas. Il a fait sortir les objets. Il m’a dit de l’aider à manger. Après, il m’a dit qu’il repart à la maison pour laver les bols puisqu’ils ont dit qu’il n’y a pas de travail aujourd’hui à l’atelier. Aux environs de 13h, je suis rentrée à la maison. A mon retour, j’ai trouvé mon neveu à la maison, je lui ai demandé les nouvelles d’Ibrahima (mon fils). Il m’a dit qu’il était parti à l’atelier. Quelques minutes après, il m’a dit qu’ils ont envoyé une photo ici qui ressemble à Ibrahima Sory et que l’intéressé a été tiré, mais je ne sais pas s’il est mort ou pas. J’ai dit alors qu’ils l’ont tué. Quelques minutes après, le chef du secteur a envoyé une délégation, ils m’ont demandé si c’est moi qui suis la maman d’Ibrahima Sory, j’ai dit oui. Ils m’ont dit que mon fils a été tué et ils m’ont présenté les condoléances. Ils l’ont tiré sur la tête. Il avait 18 ans. Il étudiait mais tout dernièrement, il s’était inscrit dans un atelier de couture. Je ne vais pas pardonner à celui qui l’a tué », a-t-elle promis avant de poursuivre :
« Même s’il participait aux manifestations, moi je ne savais pas. Je partais tôt à la Minière où je vends du riz le matin et je disais à tout le monde de ne pas sortir, puisse qu’ils ont l’habitude de tuer les gens. Je remercie tous ceux qui sont venus (les Forces Vives de Guinée) pour me présenter les condoléances », a-t-elle décalé avec des larmes aux yeux.
Le frère d’Alhassane Bah, 19 ans, tué à Wanindara, est revenu aussi sur les circonstances de la mort de ce dernier avant de s’en remettre à la volonté divine :
« Ma maman l’avait mis en commission pour vendre au marché de Wanindara. Quand il a appris qu’il y a un mouvement vers le carrefour marché et que les gens courraient, il a demandé à ma maman s’il peut fermer la boutique. On lui a dit de fermer et de rentrer à la maison. Il est resté un peu. Mais comme l’atmosphère devenait de plus en plus tendue, il a appelé ma maman et il lui a dit qu’il est en train de fermer la boutique. Ma maman lui a dit de prendre la seconde route dans le quartier qui mène vers le chef du quartier. C’est en ce moment que les gendarmes sont arrivés. Quand il a voulu fuir, ils l’ont tiré une balle au dos. Ce sont des gendarmes. Quand il est tombé, il avait un petit sac avec deux téléphones dedans, mais on n’a rien retrouvé. Il était âgé de 15 ans. C’était un apprenti maçon. Il était à Bangouya auprès de ma maman, c’est moi-même qui l’avais amené pour qu’il reste un peu à mes côtés. Il n’est resté que deux jours ici avec moi avant qu’il ne soit tué. Il aidait beaucoup ma maman là-bas. On ne va pas pardonner celui qui l’a tué. C’est Dieu qui va juger », a-t-il promis également.
Prenant la parole, Souleymane Souza Konaté, conseillé du président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), a déploré le fait que ces jeunes ont perdu la vie avant de réitérer les condoléances des Forces Vives de Guinée (FVG) à l’endroit des familles endeuillées
: « Cela ne peut pas nous faire revenir notre frère, mais ça peut apaiser la famille et ça peut permettre à la famille de faire son deuil. Beaucoup de choses se sont passées dans notre pays, nous sommes en train de faire et parcourir énormément de choses actuellement. Mais le plus important pour nous c’est d’arriver à construire ensemble une Guinée de Paix, de justice, une Guinée où les Guinéens peuvent se regarder en frères et sœurs. Ceux qui sont morts dans cette lutte, nous sommes convaincus que c’est l’idée principale qui les animaient tous. C’est ce qui nous amène à nous mobiliser fortement ce matin pour venir dire à la famille que c’est une situation difficile pour la famille, mais aussi pour nous autres. C’est pourquoi nous profitons de cette situation pour prier le tout puissant Allah pour qu’Il accueille l’âme de ce frère dans le paradis. Ils sont morts pour une conviction, ça ne devrait pas se passer comme ça parce que nous voulons que la Guinée soit celle que nous rêvons tous. Mais comme ça, il est de notre devoir de continuer la lutte. Si on réussit cette mission, on aura rendu un grand service aux martyrs. Ce n’est pas un lieu pour faire des discours politiques, mais en apprenant beaucoup de choses il est important pour nous d’éclaircir. On apprend certains dire que ces jeunes sont morts pour rien. Pour un parent de victime, ça fait énormément mal. C’est pourquoi nous disons qu’il faut rétablir certains faits. La manifestation c’est le dernier recours au niveau des Forces Vives de Guinée. Notre pays est vachement riche, lorsque c’est une minorité qui s’accapare de toutes les richesses et laisser la grande partie de la population sous le seuil de la pauvreté, c’est inacceptable. Lorsque la justice est devenue pour ceux qui gouvernent, lorsqu’on décide d’exclure les autres dans la gestion de leur pays, malheureusement il ne nous reste pas plusieurs possibilités. C’est croiser les bras et attendre Dieu, mais je ne pense pas que cela puisse résoudre le problème », a-t-il indiqué.
A l’issue de cette visite de sympathie, c’est le coordinateur national du Forum des Forces Sociales de Guinée (FFSG) qui a pris la parole au nom des émissaires des FVG. Abdoul Sacko, puisqu’il de lui, a salué la mémoire des disparus avant de rassurer que la justice leur sera rendue tôt ou tard : « Nous nous sommes mobilisés pour venir partager la douleur mais aussi la compassion des Guinéens qui sont tombés uniquement pour avoir cru à la République, simplement parce qu’ils ont pensé que notre pays devrait être géré autrement. Nous devons nous donner la main pour que la Guinée soit gérée dans la justice, dans le respect du droit. Donc, la mission d’aujourd’hui est venue faire partager leur douleur mais aussi prier pour le repos des âmes perdues, qui ont été fauchées dans le champ de l’action. Depuis le matin, les Forces Vives de Guinée sont à pied d’œuvre pour dire qu’ils ne sont pas tombés pour rien et que tout sera fait par la grâce de Dieu à ce que la République reconnaisse en eux ceux qui ont été fauchés sur le chemin de la démocratie et l’intérêt supérieur de la nation, la paix mais aussi la prospérité pour tous les Guinéens. On a visité 5 familles depuis le matin et ce n’est pas le nombre certes, c’est le symbolisme mais aussi l’attachement des Forces Vives de Guinée à la personne humaine mais aussi à tous les Guinéens qui trouveront de quelque manière que ce soit de la douleur. Notre ambition c’est d’essayer d’essuyer les larmes de chaque Guinéen qui sera touché dans sa chair, dans sa dignité, dans la défense de la démocratie et de la République », a-t-il déclaré.
La délégation était composée de plusieurs responsables politiques et sociaux notamment Cellou Baldé et le trésorier national de l’UFDG Maladho, Marc Yombouno du RPG arc-en-ciel, Tidiane Conté de l’UFR, Abdoul Sacko des Forces Sociales de Guinée et Ibrahima Diallo du FNDC.
Mohamed Lamine Souaré pour Siaminfos.com