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Guinée : tout savoir sur le projet de transformation des déchets plastiques en carburant, avec Ibrahima Diallo

A l’image de plusieurs autres pays, la Guinée est confrontée à une pollution sans précédent de son environnement. Des déchets de tous genres sont déversés çà et là. Les politiques publiques mises en place par les entités étatiques dans le domaine peinent à produire des effets escomptés.

Pour remédier à cette situation, Ibrahima Diallo, jeune entrepreneur guinéen initie à Conakry, un projet de transformation des déchets plastiques en carburant. Il a réussi à expérimenter cette innovation avec ses moyens de bord et a obtenu du pétrole pur, dit-on.

Rencontré ce mardi, 30 mai 2023 par un journaliste de siaminfos.com, Ibrahima Diallo a expliqué les tenants et aboutissants de son projet de transformation des déchets plastiques en carburant.

Siaminfos.com : Parlez-nous de votre projet ?

Ibrahima Diallo : Le projet de transformation des déchets plastiques en carburant, avant tout, c’est un projet environnemental, écologique, qui protège l’environnement. Les questions liées à la protection de l’environnement et à l’écologie sont des questions inédites, car la survie et l’avenir de l’humanité en dépendent. A l’époque du 19e – 20e siècle, les gens étaient à la quête d’un marché et utilisaient des plastiques quotidiennement pour la fabrication de plusieurs objets. Mais, nous n’avions pas considéré les impacts que ces plastiques auraient eu au fil du temps au niveau de l’environnement. Et nous savons que le plastique, c’est quelque chose qui n’est pas biodégradable, ça ne pourrit pas. Une fois dans la nature, ça peut faire plus de 100 ans sans que ça ne pourrisse. C’est vraiment quelque chose qui est primordial pour tout le monde, car plus loin ça impacte même la santé de l’être humain. Quand ces déchets plastiques se retrouvent dans l’océan, ils peuvent se décomposer en microparticules. Il y a des poissons qui peuvent avaler ces particules là et ces mêmes poissons peuvent se retrouver dans nos assiettes. Et nous savons tous que le plastique est cancérigène. Il y a aussi certains aspects sous-marins comme les mammifères qui meurent, chaque année plus de 200 mille selon les statistiques, rien qu’en rentrant en contact avec ces plastiques. Donc, le danger est là. Après le problème de réchauffement climatique, je crois que c’est le deuxième problème le plus urgent. Mon objectif, c’était d’apporter une solution pragmatique, très réaliste par rapport à ce phénomène qui envahit et qui dévaste nos océans, nos rivières.

Parlant de la Guinée, d’où est partie l’idée ?

Je suis quelqu’un qui aime entreprendre. Et on dit le plus souvent pour entreprendre, il faut savoir identifier les problèmes dont souffre la société afin d’apporter une solution. Même pas les déchets plastiques, nous savons qu’en Conakry les déchets, c’est quelque chose qui nous dérange. Il n’y a pas une politique derrière pour gérer ces déchets de façon très organisée pour ne pas qu’ils nous impactent. Donc quand je me suis intéressé à ces déchets-là, j’ai vu dedans qu’il y a un autre problème plus grave : ce sont les déchets plastiques. Donc, le déclic est parti de là.

Comment se passe le processus ?

Mon but était de trouver une solution efficace qui est différente des autres solutions déjà existantes qui n’ont pas eu un fort impact sur ce problème. Donc, c’est ce qui fut fait. J’ai pu transformer ces déchets plastiques à l’heure état initial, c’est-à-dire le pétrole. Le plastique, c’est un dérivé du pétrole. C’est à partir du pétrole, qu’on obtient le plastique. Mais en faisant ça, j’ai apporté une solution à deux problèmes : le problème de pollution du plastique et le problème énergétique, puisque je produis du carburant et nous savons actuellement qu’il y a presque une crise partielle d’énergie à cause de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

A ce jour, est-ce que vous avez pu produire une quantité de ce pétrole ?

Oui, j’ai conçu une machine qui transforme les déchets plastiques en carburant, notamment en gaz, en gasoil et en essence. Cette machine-là peut produire une dizaine de litres par jour. Mais moi je ne me limite pas à ça. Je veux que ça soit à une échelle plus grande pour pouvoir ne serait-ce que satisfaire aujourd’hui des villes comme Kankan qui n’a pas le courant, il y a aujourd’hui des préfectures reculées qui n’ont pas le courant. Donc, c’est vers ça que moi je me dirige.

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Parlez-nous de la collecte de votre matière première. Est-ce que vous arrivez à avoir les plastiques comme vous le souhaitez ?

Oui évidemment. Vous pouvez sortir ici tout de suite et vous prenez une distance de 100 mètres. Au bout de cette distance, je parie de vous pouvez remplir un sac en déchets plastiques. Même au-delà de ça aussi, au niveau du dépotoir de Dar-es-salam, il y a des gens là-bas, des groupements de femmes qui ne font que trier ces déchets plastiques. Une seule femme par exemple peut te collecter trente tonnes de plastiques par jour. Au-delà de ce dépotoir, il y a des gens aussi dans les quartiers qui ramassent ces déchets plastiques pour pouvoir les peser et puis les revendre. Le besoin est là. Regardez seulement la production journalière d’un petit marché de Conakry en déchets plastiques, vous verrez que c’est des dizaines et des dizaines de kilogrammes. Vous prenez le marché de Madina, c’est des centaines de milliers de kilogrammes de déchets plastiques qu’on jette par jour. Le plastique déjà, ce n’est pas biodégradable. Depuis que le plastique a été produit, jusqu’à présent il est là. Le plastique jeté depuis l’an 200 et plus, il est toujours là, il est intact. J’ai été au dépotoir de Dar-es-salam. On m’a montré un lot d’ordures qui a été stocké depuis 1980, j’ai creusé et j’ai vu qu’il y a des plastiques qui n’ont même pas changé de couleur à plus forte raison commencé à se dégrader. Donc, le besoin est là.

Est-ce que vous êtes entré en contact avec les organismes étatiques spécialisés dans le domaine pour d’éventuels accompagnements ?

Vous savez, il y a certaines innovations, ce n’est pas à l’individu d’aller vers l’État. C’est à l’État d’aller vers l’individu, surtout si c’est quelque chose qui engage toute une nation, tout un pays. Et nous savons que le pétrole aujourd’hui, c’est quelque chose qui est politique, c’est un secteur très sensible. Moi je me dis dans ma tête, au-delà de cette agence, c’est quelque chose qui doit venir d’en haut. C’est pourquoi, je ne suis pas allé vers eux. Mais quand j’ai essayé de rentrer en contact avec le ministère de l’énergie et le ministère du commerce et des PME, malheureusement ils n’ont pas réagi.

Aujourd’hui, qu’est-ce que vous avez besoin pour matérialiser et démarrer convenablement votre projet ?

Comme je l’ai dit, c’est un projet en partie environnemental mais comme les retombées sont un produit pétrolier et nous savons que le pétrole est un produit politique, c’est très sensible. Donc, c’est que moi j’ai besoin, c’est un soutien politique et un soutien financier venant de l’État, du gouvernement et pourquoi pas des bonnes volontés pour pouvoir vraiment vulgariser ce projet. Donc, je lance un appel à tout être humain. Aujourd’hui, quand on prend la planète terre, c’est la seule qui a accepté de nous héberger parmi tant d’autres planètes dans l’univers. Et cette planète nous appelle au secours depuis un moment. Et je pense qu’à travers ces projets environnementaux comme mon projet là, c’est aussi une occasion pour tout un chacun de se racheter en soutenant ce projet, car la planète en a vraiment besoin.

 

Entretien réalisé par Abdourahmane Pilimini Diallo pour siaminfos.com

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